Une sexualité positive?

Elodie Chopard,
Paris le 5 décembre 2019

Une personne consulte parce qu’elle souffre de « dépendance affective » dans ses relations amoureuses. Le compagnon représente à ses yeux « le moyen » par lequel elle satisfait imaginairement « l’idéal du couple » nucléaire, bâtisseur du foyer familial qui résisterait aux tempêtes : séparation des parents, conflits intergénérationnels, problèmes économiques du ménage, etc. Ses relations amoureuses se soldent par de lourdes déceptions car aucune n’aboutit à lui procurer le « besoin de sécurité » qu’elle espère. La psychanalysante, plutôt que de consentir au remaniement symbolique de son idéal s'oriente vers un repli réactionnel prenant la forme d'une pratique de la sexualité "positive". Elle s’investit dans ce mouvement de libération des mœurs jusqu’au renoncement de ses engagements professionnels. Elle vit désormais avec peu de moyens financiers pour se consacrer à occuper la position de « médiatrice » dans des groupes associatifs où se pratique cette « expérimentation de l’art érotique ». Bénévole dans des évènements culturels à caractère hédoniste, la psychanalysante s’investit dans des relations « poly-amoureuses ». Celles-ci tendent selon elle vers le « lâcher prise de l’égo, le rejet de la jalousie et de la dépendance dans le couple ainsi que la découverte ludique et charnelle des corps ». Des évènements conviviaux auxquels elle participe seule ou en couple, peuvent dès lors à tout moment, « tourner en parties fines » qui taisent leur nom.

En effet, selon ce mouvement initié entre autres par le Dr Psalti, créateur de la Sexualité Positive, cette approche est un « outil pour atteindre la compétence sexuelle, elle constitue une synthèse de la psychologie positive, des bases théoriques de la santé sexuelle et de l'hédonisme. Enfin, elle met l'accent sur l'épanouissement affectif et sexuel des individus et des couples ». La chartre et le règlement d’une association spécialisée cadre par exemple ces pratiques de groupe : « Il s’agit de créer collectivement et en conscience un espace respectueux, inclusif et émancipateur pour explorer, partager et s’épanouir dans une communication accueillante. Que chacun·e puisse exprimer et vivre ses besoins, ses limites et accueillir sans jugement ceux des autres. (…) C’est par ce maillage de bienveillance et consentement de tou·te·s que chacun·e pourra s’autoriser à se lâcher. »

Dans quelle mesure ce « lâchage » sert les intérêts symptomatiques de la vie pulsionnelle ? C’est ce qui se dévoile dans la cure de cette psychanalysante où le "Je" apparaît premièrement comme assujetti dans les lois du "Je" parle car « le sujet ne peut formuler le Tu es qu’à s’y tuer, il autrifie le partenaire ». Le respect de l’association libre du discours de la psychanalysante ne doit pas être contaminé par un écho dogmatique ou moral mais plutôt permettre à l’être de parler ce « lâchage », cette lutte entre les organisations intra-moiques issue de la Résistance du Surmoi.

Dans ce sens, le Réseau pour la Psychanalyse à l’Hôpital -RPH- a permis que cette psychanalysante soit reçue rapidement en consultation en fonction de ses moyens au sein de la Consultation Publique de Psychanalyse -CPP- située à Paris. Depuis son engagement dans sa cure, celle-ci aménage ses relations auparavant exclusivement « hédonistes » pour s’affronter à ce qui la fait souffrir en amour. Elle trouve alors une voie de sortie au passage à l’acte dans la sexualité de groupe pour embrasser la possibilité d’une relation exclusive épanouissante. Enfin, elle retrouve l’intérêt pour sa vie professionnelle et pour la reconquête de son autonomie financière qui sont autant de nouages symboliques « positifs » ! Si vous souhaitez contacter un clinicien du réseau RPH, contactez le Service d’Écoute Téléphonique d’Urgence -SETU ?- au 01.45.26.81.30.