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Exemple qui motive la clinique du partenariat entre médecine et psychanalyse sur Paris 75

Le coût psychique et financier de ne pas prendre le désir inconscient au sérieux

Fernando de Amorim 
Paris, le ..  V. 2007

Quatre situations médicales de masse, liées aux syndromes psychogènes, forment le numéro thématique publié par le Bulletin épidémiologie hebdomadaire du 24 avril 2007 : i) 82 personnes se plaignent de symptômes corporels dans un hôpital de Marseille entraînant la décision, au vu de la propagation des symptômes, de fermeture de « toutes les salles de réveil » (selon le Quotidien du médecin du 24 avril 2007) ; ii) 70 personnes à la mairie de Villejuif déclenchent des symptômes corporels entraînant l’évacuation d’une partie des locaux ; iii) 15 personnes sont touchées par des symptômes corporels dans un collège des Ardennes entraînant la décision temporaire de fermeture de l’établissement, et enfin, iv) sur 170 jeunes membres d’une chorale, une centaine se plaint de symptômes corporels inexpliqués entraînant l’hospitalisation de 23 personnes et la mobilisation de 8 véhicules de secours.

 

Dans ces quatre situations cliniques, sur une période de 2 ans à peine (entre février 2004 et janvier 2006), les services compétents sont arrivés à la conclusion que ces personnes n’avaient pas de maladie, au sens médical. Or, ces épisodes de déclaration collective de symptômes ont cependant nécessité – et avec raison – une forte mobilisation des services publics de santé, à savoir, le SAMU, les pompiers, les services d’urgence, les urgences pédiatriques.

 

Georges Salines, responsable du département Santé Environnement de l’Institut de veille sanitaire, a raison de mettre en évidence le fait que même si Charcot a démontré que les hystériques n’étaient pas des simulateurs et que Freud a découvert l’inconscient, « il nous est toujours aussi difficile d’accepter que nos souffrances puissent être à la fois réelles et sans cause matérielle. ».

 

S’il est difficile pour la population en général d’associer symptômes corporels à détresse psychique, à l’évidence cela l’est tout autant pour le corps médical. Formés à la lecture de l’organisme biologiquement malade et non au corps souffrant de désir, les médecins piétinent face à des situations de cette nature. Freud dans un texte de 1921, intitulé « Psychologie des foules et analyse du moi », parlait dans ces cas-là de « contagion psychique », que nous pouvons reconnaître dans les quatre situations médicales décrites ici. Il disait également qu’il était tout à fait possible que l’hystérie s’appuie sur un fait réel ou une maladie médicalement confirmée pour exister.

 

L’un n’empêche pas l’autre. D’où la difficulté pour les médecins de poser le diagnostic. Et c’est pour cette raison que nous pensons qu’il faut que les psychanalystes puissent être appelés à collaborer étroitement avec les médecins. Le temps d’une réforme de la médecine a sonné : mettons un bémol à cette relation duelle entre médecin et malade, relation qui n’a d’avenir que dans le conflit ou dans la mort de la relation. Et sans relation il n’y a pas de thérapeutique possible. Passons à la clinique du partenariat, à savoir, la relation entre médecin, patient et psychanalyste. Les modalités seront étudiées au cas par cas. Il est primordial que les médecins puissent s’habituer à travailler en partenariat avec les psychanalystes.

 

Comme le dit Florence Kermarec au « Quotidien » : « Nous souhaitons attirer l’attention de l’ensemble des praticiens (médecins scolaires, médecins du travail, urgentistes ou médecins généralistes) et de tous ceux qui sont amenés à intervenir sur l’existence de ce type de phénomène. ». C’est ce que fait le RPH depuis des années, avec son service d’écoute téléphonique d’urgence (SETU ?) et sa consultation publique de psychanalyse (CPP). Jusqu’à présent peu de médecins ont été sensibles à nos arguments cliniques.

 

Or, la médecine ne peut plus continuer à exclure le désir comme élément majeur de l’avenir du pronostic. Le 12 mai prochain le RPH tient son colloque autour de « La plainte en médecine et en psychanalyse » à l’hôpital Saint Louis. Nous disons clairement que des souffrances réelles sans cause n’existent pas. Il y a bien – au moins – une cause et elle est à chercher du côté de l’inconscient.

 

Et pour cela il faut un psychanalyste. On ne peut pas faire l’économie d’un psychanalyste dans la clinique médicale de ce début de siècle.