Sabrina Berdedouch
Le 19 novembre 2025
Dimanche, j’apprends par une amie assistante sociale dans un CMPP à Saint‑Denis qu’un amendement est présenté au Sénat et que celui-ci vise à ne plus rembourser les soins se réclamant de la psychanalyse. Ma réponse : « Ce n’est pas un problème puisqu’au RPH nous demandons aux patients de régler selon leurs moyens financiers. » Elle me répond : « Tant mieux ! » Nous passons à un autre sujet de discussion.
Lundi, je vois quelques psys réagir vivement sur le réseau social LinkedIn et j’apprends que cet amendement a créé un véritable remous : « Qui va payer pour les consultations ? Attaque politique contre la psychanalyse ? Cet amendement cherche à supprimer la psychanalyse des lieux de soin, comment faire ? »
Depuis le début de la semaine, je suis occupée à recevoir patients et psychanalysants, à écrire ma thèse de doctorat, à préparer, avec mes collègues, l’organisation du colloque sur la question du féminin aujourd’hui1. Sur le divan, je m’entends dire qu’enfant, je voulais devenir une adulte occupée à construire mon désir. Après cette séance, je retourne à ma consultation pour écrire cette brève : que donnerait ma semaine de travail si cet amendement était voté et viserait ainsi à « supprimer la psychanalyse des lieux de soin » ?
Je continuerai à suivre cette voie puisque c’est celle de mon désir et que mes revenus sont le résultat de celui-ci, et non de la sécurité sociale. À l’âge de 23 ans, après mes études, j’ai commencé à recevoir des patients à la CPP du 33 rue Jean‑Baptiste Pigalle dans le 9e arrondissement de Paris, local mis à disposition par le Dr de Amorim pour les jeunes cliniciens. J’y ai reçu pendant deux ans des personnes en souffrance, tout en me formant avec ma psychanalyse personnelle, des supervisions régulières, des séminaires, des groupes d’études et des colloques.
Grâce à ces deux années de travail, j’ai pu ensuite louer mon propre local. Aujourd’hui situé au 4 Cité Joly dans le 11e arrondissement de Paris, j’y travaille tous les jours de la semaine, depuis deux ans et demi. Une personne que j’avais reçue au cours de ces années-là est sortie de psychanalyse, et je suis devenue psychanalyste. C’est à partir de mon désir que j’ai pu m’accrocher à cette formation de psychanalyste et changer, professionnellement et personnellement.
Alors, que donnerait ma semaine de travail si cet amendement était voté et viserait à « supprimer la psychanalyse des lieux de soin » ? Avec et – surtout ! – sans remboursement : le désir, l’inconscient et les consultations des membres cliniciens du RPH – École de psychanalyse sont là.
Un coup d’épée dans l’eau, donc : la psychanalyse se porte bien, merci.
- Colloque du RPH – École de psychanalyse, samedi 22 novembre 2025 [Inscriptions]. ↩︎