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Quel livre aborde la question du féminin ? (II) – Le féminin et la capacité de dire non !

Ranida Bonamy
Saint-Maur-des-Fossés, le 17 octobre 2025

Le hasard des rencontres cliniques a fait que j’ai reçu quatre femmes, les unes après les autres, qui souffraient de n’avoir pu ou de ne pouvoir dire non à des moments clés de leurs vies. Certainement sous l’influence de ce que j’écoutais, je m’étais demandée s’il y avait quelque chose de féminin dans la difficulté à dire non ou stop à un mari abusif, à un père séducteur, ou à un soignant sadique et autres. Toutes ces situations se répètent à l’identique pour ces femmes depuis plusieurs années.

C’est quoi le féminin ? Ici, il n’est pas question de féminité factice, mais d’une recherche d’éléments structurant psychiquement le féminin.

Du féminin à l’ouvrage1 est un livre écrit par un collectif d’auteures psychanalystes et psychothérapeutes. Ce sont des femmes qui ont l’expérience de l’écoute clinique, mais aussi de leur propre cure, de leur intime féminin. Elles reçoivent hommes et femmes et nous disent dans ce livre, fruit d’un travail de recherche, entre autres, ce qu’est ce féminin qui concerne hommes et femmes, ce qu’est devenir femme, et la différence entre féminin et féminité.

À cette question « c’est quoi le féminin ? », l’auteure répond :

« À la lumière de son expérience et de celles des autres femmes qu’il m’a été donné d’entendre, les contours du féminin que j’esquisse relèvent à mon sens d’une ouverture. Il est également question d’un accueil. Accueillir le constat du beau comme du monstrueux en soi puis chez l’autre sans haine, ni amour, sans passion dévorante, sans rancune. Le féminin prend forme d’un entrain dans la vie, d’un mouvement, d’une curiosité, d’une recherche qui a perdu sa passion vengeresse et phallique, d’une expérience. C’est une façon de faire avec un manque, avec un phallus symbolique. C’est être détentrice d’un pouvoir utilisé à bon escient, qui n’est pas employé pour détruire. C’est une façon de s’aimer, puis d’aimer, de prendre soin. »2

L’anatomie des femmes porte vers l’ouverture et l’accueil et ces caractéristiques peuvent y être pour quelque chose dans la structuration psychique féminine.

Madame D. a 30 ans. Plus jeune, elle a souffert d’anorexie. Dans ses séances, elle évoque un père à qui elle a « eu du mal à dire non » lorsqu’il dépassait ses limites et se mêlait de son intimité. Cette patiente et d’autres, en refusant de dire non, qu’accueillent-elles ? Cela me fait penser aux pièces de théâtre de Sarah Pèpe. C’est une auteure qui écrit sur la thématique du féminin et l’un de ses titres est « Celle qui ne dit pas a dit»3. Cette pièce témoigne des effets constructifs de la libération d’une parole vraie, celle qui repose sur la castration, un non bien placé, le dégonflement du déchaînement pulsionnel, le sien et celui de l’autre. Dire non, c’est commencer à sortir de son propre masochisme et donc se protéger du déferlement des organisations intramoïques4 en soi et de celui d’autrui.


  1. Blachère, C., Dangréaux, S., Ferlicot, O., Mihoubi, L. Rakotoasitera, L.-L., Simmou, J. & Vitteaut, S. Du féminin à l’ouvrage, Paris, RPH Éditions, 2025. ↩︎
  2. Ibid, pp. 100-1. ↩︎
  3. Pèpe, S. Celle qui ne dit pas a dit, Villejuif, Édition Daronnes, 2024. ↩︎
  4. Blachère, C., Dangréaux, S., Ferlicot, O., Mihoubi, L. Rakotoasitera, L.-L., Simmou, J. & Vitteaut, S. Du féminin à l’ouvrage, Paris, RPH Éditions, 2025. ↩︎