Il n’est pas rare d’entendre les patients ou psychanalysants se qualifier de « parano », d’« autiste », de « fou », de « HPI », « HPE », « TDAH » et autres. Certains disent qu’ils ont besoin d’un diagnostic pour se comprendre. Pour quelques-uns, c’est même une condition inévitable pour la poursuite de la cure. Il n’est pas rare que, si le clinicien ne répond pas à cette demande, le patient ou psychanalysant abandonne sa cure. Que traduit cette demande de diagnostic ?
La libération de la parole sur la santé mentale dans la sphère publique, sur les réseaux sociaux, les plateaux télévisés à des heures de grande écoute, dans le domaine du sport, notamment à travers les témoignages de sportives de haut niveau (ex : Mélanie de Jesus dos Santos, gymnaste française) participe à une conscience collective sur l’importance du soin psychique et vulgarise une part de ses connaissances, les rendant ainsi accessibles au plus grand nombre. Ce phénomène n’est pas inédit ou propre au soin psychique. La multiplication des termes diagnostics dans le langage courant en est une conséquence.
La connaissance n’est pas le savoir. Un patient ou psychanalysant peut emprunter un terme diagnostic pour se décrire, pour s’identifier par exemple à un membre schizophrène ou paranoïaque de sa famille, pour se rabaisser, pour le confort d’être dans une case reconnue, ou simplement parce que c’est mieux que rien. Dans la demande d’un diagnostic, il y a une demande de reconnaissance, une demande d’amour, parfois vindicative au point de vouloir repartir avec l’objet diagnostiqué dans la poche dès la première séance. Lorsque cette demande est insistante, ne cède pas et rompt, hélas, le transfert naissant, elle ne laisse pas la possibilité de construire un savoir sur soi, différent d’une métonymie, d’une connaissance imaginaire.
Lorsqu’un médecin dit à une patiente qu’elle est dépressive, il est important que le psychothérapeute ou supposé-psychanalyste lui demande si elle est d’accord avec ce terme. Si oui, que signifie-t-il pour elle. Parfois, ces définitions toutes personnelles qui relèvent du savoir sur soi peuvent être surprenantes et très différentes de celles sur les manuels de médecine, de psychologie ou de psychanalyse. Elles présentent un accès au trésor du signifiant1[1] dont parle Jacques Lacan, celui de l’Autre barré et non celui d’un autre, un frère, un semblable, à quelques différences près.
Selon l’enseignement du docteur Fernando de Amorim, le diagnostic en psychanalyse est un fruit mûr qui tombe à point nommé, cueilli par le clinicien au moment où il se décroche de l’arbre, sans précipitation. Le Manuel clinique de psychanalyse2[2], écrit par onze membres cliniciens psychanalystes et psychothérapeutes du RPH – École de psychanalyse, sous la direction du docteur de Amorim, s’adresse à l’étudiant, au psychiste et au médecin désireux d’en savoir davantage sur la clinique de l’inconscient et sur le diagnostic en psychanalyse. Ce manuel apporte des indications précises sur les moments clés de la cure, notamment sur sa conduite selon le diagnostic structurel de psychose, névrose ou perversion.