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Qui forment les jeunes à la psychanalyse ?

 

Aiuto !!! Où sont les jeunes ?

Jean-Baptiste Legouis
Paris 18ème, le 5. IV. 2011

 

Dans la soirée du lundi 4 avril 2011, à l’initiative de l’association « La lettre lacanienne » et du mouvement convergenciade Paolo Lollo, Alessandra Guerra, présentait Il manifesto per la difesa della psicanalisi. Il s’agissait d’exposer la situation de la psychanalyse en Italie vingt ans après l’adoption d’une loi par le gouvernement italien encadrant le statut des psychothérapeutes.

 

La législation italienne date de 1989 et elle semble très proche de l’amendement Accoyer que nous connaissons bien en France. Les psychanalystes italiens ont bataillé pour que la psychanalyse ne rentre pas dans le cadre de cette loi. Mais Alessandra Guerra nous informe que l’effet pervers a été d’isoler les psychanalystes laïcs, désignant ainsi les psychanalystes qui ont refusé de s’inscrire à l’ordre des psychothérapeutes. Elle souligne également l’affaiblissement du discours psychanalytique dans son pays et le vieillissement des écoles de psychanalyse. Selon elle, on y trouve pas ou peu de cliniciens de moins de cinquante ans. La suite logique du processus est la disparition de la psychanalyse faute de psychanalystes.

 

Cette constatation soulève une question essentielle. Qu’est-ce qui donne envie ou non à de jeunes étudiants de s’orienter vers la psychanalyse ? En corollaire, nous pouvons nous demander ce que font les psychanalystes pour intéresser de jeunes gens à la théorie et à la clinique psychanalytique ?

 

Si pendant plusieurs décennies se sont essentiellement les médecins qui se sont tournés vers la psychanalyse nous savons que ce n’est plus le cas aujourd’hui et que ce sont les psychologues qui ont pris le relais. Un étudiant en psychologie voit bien, à la fin de son cursus universitaire qu’il ne sait pas conduire une psychothérapie. Il a appris à reconnaître des symptômes, des syndromes, il sait faire des entretiens d’aide ou de soutien psychologique. Il sait également comment évaluer le niveau intellectuel ou la personnalité d’un patient grâce à des tests. Mais face à des patients qui expriment leur détresse et leur souffrance, leur plainte et leur demande, il est démuni. Il ne sait pas quoi faire.

 

L’attrait des méthodes comportementales et cognitives est de pouvoir intéresser les étudiants grâce à une méthode claire et simple dont on acquiert les techniques en quelques années, et les sortir ainsi de l’embarras dans lequel ils se trouvent. La psychanalyse apparait, en comparaison, comme une vieillerie incompréhensible et ennuyeuse, qui nécessite de longues années d’études. Sans parler des difficultés pour se repérer au milieu des différentes écoles et le brouhaha qui se dégage des querelles de chapelles.

 

Pour donner envie aux jeunes générations de s’approcher des écoles de psychanalyse, c’est aux psychanalystes de témoigner publiquement des effets de la psychanalyse, sur eux d’abord, en tant que psychanalysant. Il est urgent de dire haut et fort que la psychanalyse donne envie de danser, de chanter, de se cultiver, d’aimer, de rire, de s’émerveiller, de travailler, de créer. Dire que la psychanalyse n’est pas triste, ni lourde. Elle est sérieuse parce qu’elle fait série. Elle est rigoureuse mais pas rigide. Elle est joyeuse et nourrit notre gai savoir.

 

Il faut également encourager les jeunes qui ont entendu quelque chose de l’inconscient freudien à rencontrer un psychanalyste, rencontrer leur désir sur le divan et rencontrer des patients pour apprendre, grâce à la clinique psychanalytique, sans attendre pour cela d’avoir cinquante ou soixante ans. C’est ce que nous faisons au RPH depuis bientôt quinze ans.

 

Pour conclure et pour réveiller vos oreilles et vos jambes je vous invite à vous promener dans les dernières décennies musicales avec Blue Suede Shoes (Carl Perkins, Elvis Presley ou Bill Haley), Light my fire (The Doors), Miss You (The Rolling Stones), Marcia Baila (Les Rita Mitsouko), Groove Is In The Heart (Dee-Lite), Trompeta Alegre (Rafael Rodriguez) I gotta feeling (Black Eyed Peas). Notez que tous ces musiciens avaient moins de trente ans lorsqu’ils ont commencé leur carrière.

 

Un premier pas pour inviter la jeune génération à nous rejoindre gaiement dans la danse avec le réel que permet la psychanalyse.