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La Consultation Publique de Psychanalyse : un engagement clinique auprès de personnes en situation de précarité

 

La Consultation Publique de Psychanalyse : un engagement clinique auprès de personnes en situation de précarité

 

Lucille Mihoubi

Paris le 30 novembre 2017

 

 

La Consultation Publique de Psychanalyse (CPP) du RPH-Ecole de psychanalyse est un dispositif né en 1991 de l’expérience clinique du Dr Fernando de Amorim, psychanalyste à Paris. La visée était initialement que les malades ayant débuté une psychothérapie durant une hospitalisation aient la possibilité de la poursuivre en ville avec le même clinicien. La CPP reçoit à présent toute personne en souffrance, que cette souffrance soit organique, corporelle ou psychique.

 

La CPP est accessible à tous ceux qui désirent rencontrer un psychothérapeute ou un psychanalyste dans la mesure où ils y sont accueillis en fonction de leurs moyens financiers. La CPP s’inspire en fait de la pensée de Freud car c’est lui, en 1919, qui a eu l’idée originale, concrétisée en 1920 par l’ouverture de la polyclinique de Berlin, d’une institution proposant des cures psychanalytiques à la portée de tous :

 

« […] un jour ou l’autre, la conscience morale de la société s’éveillera et elle lui rappellera que le pauvre a tout aussi bien droit à l’aide animique qu’à celle que de nos jours il a déjà, l’aide chirurgicale […] Alors seront édifiés des établissements ou des instituts de consultation auxquels seraient affectés des médecins formés à la psychanalyse […] Ces traitements seront non payants. »1

 

A la CPP, la gratuité est réservée, en revanche, à des situations extrêmes de précarité. Dans la majorité des cas, les patients et les psychanalysants sont invités à régler « leur maximum », c’est-à-dire un montant qui les engage dans leur cure mais ne les mette pas davantage en difficulté financière.

 

Bien souvent, la cure amène progressivement ces personnes à interroger leur précarité. Ainsi, Mme H. dit : « Je vois le début et la fin de ma vie, c’est tout. Je me vois comme une adolescente et comme une vieille mais pas au milieu, pas dans une vie d’adulte. La vie d’adulte me terrifie alors… je choisis la précarité, comme ça, je n’ai pas à bâtir sur le long terme ». M. T. réalise : « Je ne savais pas jusqu’ici que j’avais un problème avec l’argent. En fait, je m’empêche d’être heureux, je m’autodétruis... Pourquoi j’ai peur de réussir ? Parce que je viens d’une famille misérable… Et puis, si je ne possède pas trop, au moins comme ça, j’évite de trop perdre ». Mme R. affirme : « Mon problème principal, c’est l’argent, le fait de ne pas en avoir. J’ai toujours été à découvert. Mon découvert, c’est mon trou. Je continue de creuser mon trou. La vie m’enterre. J’ai envie de flamber tout le monde. J’ai envie de flamber l’univers. J’ai l’impression que j’ai contrarié l’univers, que j’ai mal fait quelque chose, je me sens punie ».

 

La CPP permet donc à ces personnes en situation de précarité de trouver un espace où elles parlent librement ce besoin de punition, leur haine de soi et des autres, leurs identifications aux images parentales ; la visée étant qu’elles s’en dégagent pour pouvoir construire des solutions plus satisfaisantes pour leur vie et un rapport plus engagé avec leur existence.

 

 

1Freud, S. (1919). Les voies de la thérapie psychanalytique, in Œuvres Complètes de Freud, vol. XV, PUF, Paris, 2002, p. 107.